Introduction

En 2011, des mutations de GATA2 ont été décrites dans 4 syndromes connus dans la littérature médicale sous plusieurs noms : syndrome MONOMAC, syndrome de déficit des cellules dendritique, syndrome d’EMBERGER et leucémies aiguës myéloblastiques familiales. L’ensemble de ces manifestations peuvent être présentes chez un même malade de façon successive, mais il s’agit d’une seule entité morbide(1).
Le spectre du déficit en GATA2 est très hétérogène, il peut comprendre une cytopénie intéressant les neutrophiles, les monocytes, et les lymphocytes B et NK (Natural Killer) , mais aussi les plaquettes; une leucémie aiguë myéloblastique (LAM) ; un syndrome myélodysplasique (MDS) ; des infections à mycobactéries atypiques ; une protéinose alvéolaire et un lymphœdème(2).  Le gène GATA2 code pour un facteur de transcription essentiel pour la synthèse des cellules sanguines (l’hématopoïèse) et les cellules des vaisseaux lymphatiques. Une mutation au niveau de ce gène entraine un déficit en GATA2 responsable des atteintes hématopoïétiques (cytopénies, myélodysplasie, …) et vasculaire (lymphœdème et protéinose alvéolaire)(3).

Transmission génétique

Le gène GATA2 est localisé sur le chromosome 3 en 3q21.3
Le mode de transmission du syndrome GATA2 est dominant. Ce qui veut dire qu’une personne atteinte a un risque sur deux de transmettre ce gène et ce syndrome à ses enfants.
Au sein d’une fratrie, une fois qu’on découvre une telle anomalie, 2 cas se présentent :

  • La mutation a été transmise par un des parents. Dans ce cas la moitié de la fratrie, statistiquement, est atteinte.
  • La mutation génétique n’est présente chez aucun des 2 parents.  Dans ce cas, on dit qu’il s’agit d’une mutation De Novo, et la fratrie est indemne. Mais le patient peut transmettre l’anomalie.

Un diagnostic ante natal peut être proposé.

Expression hématologique et clinique

La présentation du syndrome GATA2 doit tenir compte de l’âge auquel on fait le diagnostic de la maladie.
Dans la première décade (de 0 à 10 ans), le plus souvent cette situation est non symptomatique et sans complication. Une neutropénie modérée associée à une monocytopénie et/ou une macrocytose est le premier signe de ce tableau. Mais ceci ne peut être vu que sur une prise de sang et, de plus, n’est pas constant. Des éléments ‘malformatifs’ peuvent être associés comme une surdité, un lymphœdème, et parfois des anomalies de l’appareil urinaire comme une dilatation pyélo-calicielle.
Les symptômes proprement dit de la maladie apparaissent usuellement entre 10 et 30 ans. La gamme des problèmes de santé est assez large et associe généralement plusieurs ordres de symptômes.

Premièrement, des infections de tous types sont possibles : Des infections bactériennes (pneumonie, pyélonéphrite, cellulite), des infections virales (en particulier des infections à papillomavirus, c’est-à-dire des verrues, mais aussi grippe maligne, varicelle sévère, …), et parfois infections à mycobactéries. Usuellement il s’agit de mycobactérie atypique. Les mycobactéries sont une classe de germes ayant une faible croissance et induisant plutôt des infections lentes. La plus connue des mycobactéries est la tuberculose (mais c’est rarement le cas dans le GATA2).

Deuxièmement, une baisse des cellules sanguines (cytopénies) est fréquemment rencontrée. Elle intéresse essentiellement les monocytes, les cellules dendritiques, les neutrophiles, et les lymphocytes B et NK. Elle touche rarement les globules rouges et les plaquettes. Il existe là une gradation entre des formes peu symptomatiques, sans besoin transfusionnel, et des situations qui requièrent des transfusions. Cette cytopénie peut évoluer vers une insuffisance médullaire totale.  Une transformation maligne myéloïde, précédée ou non d’un syndrome myélodysplasique, peut apparaître.

Troisièmement, des atteintes extra hématologiques peuvent survenir. Il s’agit d’atteinte vasculaire à type de lymphœdème, d’une atteinte pulmonaire à type de protéinose alvéolaire par défaut de résorption de surfactant (le liquide qui tapisse les alvéoles),  d’une atteinte sensorielle à type de surdité congénitaleet d’une atteinte stomatologique à type d’aphtose récidivante et de gingivopathie chronique.

Thérapeutique spécifique

Il est important de prendre en charge chacune des manifestations de la maladie. Un suivi pluridisciplinaire s’impose. Des recommandations sont proposées.
Les complications infectieuses sont gérées par une prophylaxie antibactérienne (Le Cotrimoxazole pour les infections bactériennes et l’azytromycine pour la prophylaxie contre les mycobactéries atypiques) et des perfusions d’immunoglobulines. L’atteinte bucco-dentaire nécessite une bonne hygiène orale et un suivi régulier chez le dentiste. Le traitement des verrues passe par différentes modalités de traitement où la prévention vaccinale joue un rôle primordial.
La surveillance au long court des patients nécessite un accompagnement par une équipe expérimentée afin de recherche une potentielle évolution maligne ou myélodysplasique.
L’atteinte pulmonaire est aggravée par le tabagisme actif et passif qui est fortement déconseillé.
En total, une bonne prise en charge nécessite une coordination entre pédiatre, hématologue, dermatologue, gynécologue, pneumologue et dentiste.
Mais au-delà de chacune des prises en charge, se discutent des soins plus globaux et en particulier la greffe de moelle qui est curatrice du déficit immunitaire et des complications sanguines (myélodysplasie, leucémie).

Bibliographie

  1. Donadieu J, Lamant M, Fieschi C, de Fontbrune FS, Caye A, Ouachee M, et al. Natural history of GATA2 deficiency in a survey of 79 French and Belgian patients. Haematologica. 2018;103(8):1278–87.
  2. Hsu AP, McReynolds LJ, Holland SM. GATA2 deficiency. Curr Opin Allergy Clin Immunol. 2015 Feb;15(1):104–9.
  3. McReynolds LJ, Calvo KR, Holland SM. Germline GATA2 Mutation and Bone Marrow Failure. Hematol Oncol Clin North Am. 2018 Aug;32(4):713–28.